jeudi 8 octobre 2009

Venezuela, Honduras, Pérou, Equateur : « petits » oublis et « grands » mensonges des médias



Article d'Eric Toussaint, paru le 5 octobre sur le site du CADTM (Comité pour l'Annulation de la Dette du Tiers Monde).


Il convient de prendre la mesure du danger que constitue l’attitude systématiquement hostile adoptée par l’écrasante majorité des grands médias européens et nord-américains (ainsi que par l’organisation Reporters sans frontières) à l’égard des expériences en cours en Equateur, en Bolivie et au Venezuela. Cette hostilité n’a d’égale que le silence embarrassé et complice à l’égard des putschistes honduriens ou de la répression exercée par l’armée péruvienne contre les Indiens d’Amazonie.

Pour illustrer cette affirmation, quelques faits récents.

1) Le 5 juin 2009, l’armée péruvienne a massacré à Bagua plus de 50 Indiens d’Amazonie qui protestaient contre les concessions de terres accordées par le gouvernement d’Alan Garcia aux transnationales étrangères, principalement européennes. Cela n’a pas provoqué la réprobation des grands groupes de presse mondiaux |1|. Ceux-ci donnaient alors la priorité quasi exclusive aux protestations en cours en Iran. Non seulement la presse n’a pas réprouvé la répression au Pérou, mais à peine y a-t-elle fait écho. Or, le mécontentement était tel au Pérou que le gouvernement a dû annoncer l’abrogation du décret présidentiel contre lequel les Indiens d’Amazonie étaient entrés en lutte. Encore une fois, la couverture par les médias de ce recul du gouvernement a été quasiment nulle. Posons-nous la question suivante : si une intervention de l’armée vénézuélienne ou équatorienne avait provoqué la mort de dizaines d’Indiens d’Amazonie, quelle aurait été la couverture médiatique ?

2) Lorsque le président constitutionnel Manuel Zelaya a été renversé par les militaires le 28 juin, l’écrasante majorité des médias a déclaré, en contradiction totale avec la vérité, que les militaires réagissaient à sa volonté de modifier la Constitution afin de rester au pouvoir. De nombreux medias ajoutaient qu’il suivait en cela l’exemple d’Hugo Chavez, présenté comme un dirigeant populiste autoritaire. En réalité, Manuel Zelaya proposait aux citoyens honduriens de se prononcer en faveur de l’organisation d’élections générales à une Constituante ce qui aurait représenté une réelle avancée démocratique dans ce pays. C’est ce qu’expliquent très bien Cécile Lamarque et Jérôme Duval, de retour d’une mission du CADTM au Honduras : « Le coup d’État est réalisé le jour où Manuel Zelaya organise une "consultation" à caractère non contraignant demandant aux Honduriens s’ils désiraient, ou non, la convocation d’une Assemblée nationale constituante, après les élections prévues le 29 novembre 2009. La question était : «  Êtes-vous d’accord qu’aux prochaines élections générales de 2009, une 4e urne soit installée pour permettre au peuple de se prononcer sur la convocation d’une assemblée nationale constituante ? OUI ou NON  ». Si cette consultation avait recueilli une majorité de "oui", le président aurait soumis un décret à l’approbation du Congrès pour que, le 29 novembre, les Honduriens se prononcent formellement sur la convocation d’une Constituante, dans une "quatrième urne" (les trois premières étant réservées respectivement à l’élection du président, des députés et des maires). Pour donner un semblant de légalité au coup, le Congrès et la Cour Suprême, associés au putsch, ont jugé ce scrutin illégal et ont fait valoir que le président Zelaya a « violé la Constitution » en prétendant la modifier « pour pouvoir briguer un nouveau mandat », à la manière d’un « apprenti dictateur chaviste ». Or, Manuel Zelaya ne cherchait pas, via cette consultation populaire, à reconduire son mandat présidentiel lors des prochaines élections puisque celles-ci se tiendront dans le cadre de l’actuelle Constitution qui prévoit des mandats présidentiels de quatre ans non renouvelables. Zelaya ne pouvait donc pas être candidat à sa propre succession. » |2|.

Alors que les mouvements populaires d’opposition aux putschistes ont multiplié grèves et manifestations en juillet, en août et septembre, les grands médias y ont à peine consacré quelques lignes. Les rares fois où les grands quotidiens consacrent un article de fond à la situation au Honduras, ils pratiquent une politique de dénigrement du président constitutionnel quand ils ne présentent pas carrément l’action des militaires sous la forme d’un coup militaire démocratique. C’est le cas du Wall Street Journal, qui dans son éditorial du 1er juillet 2009, écrivait que “le coup d’Etat militaire qui a eu lieu au Honduras le 28 juin dernier et qui a conduit à l’exil le président de ce pays d’Amérique centrale, Manuel Zelaya, est étrangement démocratique”. L’éditorial ajoute que “les autorités législatives et judiciaires resteront intactes” suite à l’action militaire. De son côté et de manière plus nuancée, le célèbre quotidien français Le Monde a participé à une campagne de dénigrement de Manuel Zelaya. En voici un exemple. Le 12 septembre 2009, Jean-Michel Caroit, son envoyé spécial au Honduras, cite les paroles d’une Française expatriée dans ce pays et ensuite accole le mensonge répété systématiquement sur les mauvaises intentions attribuées à Manuel Zelaya : « « Pour les Honduriens, le retour de Zelaya est inacceptable car il signifierait vingt ans de dictature à la [Hugo] Chavez », s’exclame Marianne Cadario, en référence au président du Venezuela qui – comme son allié Manuel Zelaya prétendait le faire (c’est moi qui souligne) – a modifié la Constitution pour pouvoir se faire réélire. Marianne Cadario, une Française installée depuis trente ans au Honduras, se dit « hyperchoquée par la réaction de la communauté internationale » qui a condamné le putsch.  ». |3| Le ton des journaux comme Le Monde et Libération a commencé à changer fin septembre après que les putschistes aient franchi plusieurs degrés supplémentaires dans la répression. Il est devenu assez critique à l’égard des putschistes. Ceci dit, le quotidien Libération mérite un prix pour l’utilisation des euphémismes. En effet, le 28 septembre 2009 (3 mois après le coup jour pour jour), il intitulait « Parfum de dictature »(c’est moi qui souligne) le paragraphe dans lequel il expliquait que le gouvernement putschiste avait décrété : « l’interdiction de «  toute réunion publique non autorisée  », arrestation de «  toute personne mettant en danger sa vie ou celle des autres  », «  évacuation  » des locaux occupés par les manifestants et brouillage de «  l’émission par n’importe quel média de programmes portant atteinte à la paix . » » |4|.

3) Début août 2009, l’intention des autorités vénézuéliennes de remettre en cause le droit d’émettre de 34 radios et télévisions a trouvé un écho important dans la presse internationale sur le thème : « c’est une preuve de plus de la quasi disparition du droit d’expression et de critique dans ce pays autoritaire ». La manière dont la grande presse traite la situation des médias au Venezuela est unilatéralement hostile aux autorités du pays, alors que 90% des médias vénézuéliens sont privés et soutiennent pour la plupart très activement des campagnes de désinformation. Globovision, une des principales chaînes de télévision privées, a participé activement au coup d’Etat militaire contre Chavez le 11 avril 2002. Un reportage réalisé par Globovision a fait le tour du monde le 11 avril 2002 et dans les jours qui suivirent le coup militaire. Il s’agit d’un montage qui falsifie la réalité. On y voit des civils présentés comme chavistes en train de tirer au pistolet à partir d’un pont dans une direction qui n’est pas identifiable. La voix off du journaliste de Globovision affirme que les chavistes sont en train d’abattre des manifestants d’opposition qui défilent pacifiquement dans la rue en dessous du pont. Le parquet vénézuélien a pu reconstituer le déroulement exact des faits à partir de l’analyse des reportages et des différentes photos prises par des particuliers le 11 avril 2002. En fait, les militants chavistes qui, selon Globovision, tiraient sur des manifestants, répondaient en réalité à des tirs provenant d’un blindé de la police métropolitaine alliée aux putschistes. Les manifestants d’opposition n’étaient plus dans la rue vers laquelle tiraient les chavistes au moment des faits. Plusieurs sources ont pu démontrer sans équivoque possible que les putschistes avaient programmé l’assassinat de manifestants anti-chavistes en attribuant ces crimes à Chavez pour justifier leur coup. Le 11 avril 2008, les téléspectateurs vénézuéliens ont pu revoir les images de la conférence de presse donnée par les militaires putschistes à un moment où aucun manifestant n’avait encore été tué. Or, ces militaires y affirmaient qu’ils prenaient le pouvoir suite aux assassinats réalisés par les chavistes, ce qui corrobore clairement la thèse selon laquelle ils avaient délibérément planifié ces assassinats pour justifier leur action séditieuse. 

Au cours des deux jours qui suivirent le coup d’Etat, les 12 et 13 avril 2002, alors que des centaines de milliers de personnes non armées encerclaient les casernes putschistes pour réclamer le retour d’Hugo Chavez emprisonné, Globovision n’a diffusé aucune image de ces protestations, elle expliquait que le calme était revenu dans le pays et que Hugo Chavez avait donné sa démission et était en route vers Cuba. Au cours des dernières heures du putsch, cette chaîne se contentait de diffuser des dessins animés et des émissions de variété |5| . Globovision s’est donc fait complice des putschistes à plusieurs moments clé ce qui a amené les associations de parents des victimes et les survivants blessés à exiger une condamnation de la chaîne. Ce à quoi le gouvernement chaviste s’est jusqu’ici refusé afin d’éviter que la campagne internationale menée contre lui ne monte subitement de plusieurs crans. Plusieurs associations de défense des droits humains sont d’ailleurs mécontentes de cette attitude passive de la part des autorités vénézuéliennes.


Plus récemment, Globovisión a manifesté sa sympathie pour les auteurs du coup d’Etat du 28 juin 2009 au Honduras. Les animateurs de plusieurs émissions de Globovision n’ont rien fait d’autre que de soutenir le coup d’Etat au Honduras depuis le début, accusant à leur tour le gouvernement Chavez d’ingérence pour avoir condamné le coup. A titre d’exemple, Guillermo Zuloaga, président de Globovision a affirmé le 17 juillet dernier que “le gouvernement de Micheletti est conforme à la Constitution, et nous voudrions, nous serions ravis qu’ici au Venezuela, la Constitution soit respectée de la même manière qu’elle l’est au Honduras”, marquant ainsi clairement son soutien au gouvernement putschiste.

Globovision n’a jamais fait l’objet d’une interdiction d’émettre. Quel est le grand média européen ou nord-américain qui mentionne ce fait ? Quel grand média européen ou nord-américain informe le public sur le fait que l’écrasante majorité des médias vénézuéliens sont contrôlés par le secteur privé ? Qu’ils représentent plus de 90% de l’audimat au niveau télévisuel. Qu’ils attaquent avec une violence extrême le gouvernement présenté comme une dictature et que certains d’entre eux bien qu’ayant participé activement au coup d’Etat contre un président constitutionnel, continuent à émettre librement depuis sept ans. Peut-on imaginer que le général de Gaulle n’aurait pas pris des mesures répressives à l’égard d’un journal, d’une radio ou d’une télévision qui aurait soutenu activement le coup de l’OAS au moment de la guerre d’Algérie ? Ne trouverait-on pas normal que le gouvernement espagnol prenne des mesures contre les médias qui auraient soutenu activement en temps réel le colonel Tejero lorsque, à la tête d’un groupe de militaires putschistes, il a menacé d’une arme les députés présents aux Cortes |6| ? Si Manuel Zelaya était restitué dans son mandat de président constitutionnel, lui et son gouvernement ne seraient-ils pas en droit de demander des comptes et de prendre des mesures contre les propriétaires des médias honduriens qui ont résolument appuyé les putschistes en déformant systématiquement la réalité et en ne couvrant pas les multiples violations des droits humains commises par les militaires ?

4) Les dépenses d’armement. A lire la presse européenne ou d’Amérique du Nord, on a nettement l’impression que le Venezuela est en train de faire d’importantes dépenses d’armement (notamment auprès de la Russie,) ce qui constitue une menace pour la paix dans la région. Or si l’on en croit la CIA |7|, la situation est toute différente, le budget militaire vénézuélien est le 6e de la région par ordre d’importance, il vient après ceux du Brésil, de l’Argentine, du Chili (beaucoup moins peuplé que le Venezuela et considéré comme un modèle), de la Colombie et du Mexique. En termes relatifs, ramené au produit intérieur brut de chaque pays, le budget militaire vénézuélien vient au 9e rang de l’Amérique latine ! A-t-on pu lire cette information dans la grande presse ? 

Par contre, on aura pu lire en août 2009 que la Suède demandait des comptes au Venezuela parce que le gouvernement colombien avait une fois de plus dénoncé son voisin comme fournisseur d’armes à la guérilla des FARC. La Suède avait en effet déclaré à la Colombie que des missiles SAAB retrouvés dans un camp des FARC avaient été fournis au Venezuela. Qui a pu lire la réponse détaillée donnée par Hugo Chavez ? Les missiles en question avaient été volés dans un port vénézuélien en 1995, quatre ans avant que Chavez n’accède à la présidence de la République…


Conclusion : Il faut prendre conscience de l’asymétrie avec laquelle les grands médias traitent des événements et garder dès lors un esprit hautement critique. Le discrédit porté contre Hugo Chavez, Rafael Correa et Evo Morales est tel qu’il prépare l’opinion publique internationale à la passivité au cas où une nouvelle tentative de coup d’Etat aurait lieu ou à l’approbation de mesures agressives prises par un gouvernement comme celui des Etats-Unis. Parmi les accusations insidieuses dénuées de fondement, on peut lire dans la presse espagnole (dont El Pais) que la campagne électorale de Rafael Correa a été financée par les FARC. On peut lire également que les autorités vénézuéliennes ne combattent pas le narcotrafic. Dans le cas du président hondurien Manuel Zelaya, le discrédit porté sur lui, vise à empêcher une mobilisation de l’opinion internationale en faveur de sa restitution à la tête de l’Etat.


Notes

|2| Cécile Lamarque et Jérome Duval, « Honduras : Pourquoi le coup d’État », 17 septembre 2009, www.cadtm.org/Honduras-Pourquoi-le-coup-d-Etat

|3| Jean-Michel Caroit, « Au Honduras, la campagne électorale s’ouvre dans un climat de haine », Le Monde, p. 8, samedi 12 septembre 2009.

|5| Il est intéressant de mentionner à ce propos l’initiative prise par le gouvernement d’Hugo Chavez le 11 avril 2008 - six ans après le coup d’Etat. Le gouvernement a utilisé son droit de passage sur les antennes privées et publiques pour faire rediffuser l’intégralité du reportage réalisé par les chaînes privées anti-chavistes (Globovision, RCTV...) de la séance officielle d’intronisation du président et du gouvernement putschiste dans un salon du palais présidentiel Miraflores. Le programme auquel tous les spectateurs vénézuéliens ont pu assister le 11 avril 2002, a donc été rediffusé sans aucune coupure et sans aucun commentaire critique de la part du gouvernement chaviste. Celui-ci a compté sur l’esprit critique de la société vénézuélienne pour qu’elle se fasse elle-même une opinion sur la complicité active des médias privés avec les responsables du coup parmi lesquels on a pu reconnaître les principales autorités de l’Eglise catholique, les chefs militaires factieux, le dirigeant du syndicat jaune CTV (Centrale des Travailleurs du Venezuela), les dirigeants d’entreprises privées et le président de la Fédération patronale vénézuélienne (Fedecamaras), Pedro Carmona. A noter que ce président qui a occupé le pouvoir pendant à peine environ 36 heures est aujourd’hui affublé communément du sobriquet "Pépin le Bref" (« Pepe el breve »).

|6| Le 23 février 1981, à la chambre haute du Parlement, a eu lieu une tentative de coup d’Etat organisée par des secteurs franquistes. Le colonel Tejero qui la dirigeait, a menacé d’une arme les députés et les a pris en otage au moment de l’investiture du nouveau président de gouvernement.


samedi 3 octobre 2009

Du grand vide avec une écharpe rouge

Merci au camarade C S P pour son post, que nous reproduisons ici.



Ébouriffante illustration d'un journalisme de révérence à la française qui ne sait plus où donner de la langue pour lécher frénétiquement tous les pouvoirs, tare intellectuelle ambulante dont le demi-cerveau n'en finit plus de clapoter contre ses parois crâniennes en produisant des floc-floc de liquide cépahalo-rachidien anémié à force de probables tares congénitales - qui font soupçonner un lourd héritage consanguin dans sa famille -, créature au physique aussi ingrat et débile que la purée froide idéologique qui s'échappe malencontreusement d'une bouche qu'on rêverait de coudre avec un fil de pêche et une très grosse aiguille, maigrichon hystérique dans la droite lignée des Eric Zemmour et autres réactionnaires crapoteux, tous incapables physiquement de dominer un teckel mais qui rêvent de cette Force et de ce Courage dont ils sont bien incapables tant ils sont lâches et couards - et donc, réactionnaires, puisque le réac est fondamentalement veule, c'est dans sa nature profonde -, encore plus ridicule de snobisme achevé que toute la rédaction de précieuses ridicules alcooliques qui s'épanchent dans Causeur, tout aussi demeuré et baveux qu'un Ivan Rioufol - même si ce dernier est atteint de rares pathologies mentales qui devraient charitablement lui valoir de massives injections de neuroleptiques directement dans la jugulaire, avant que de le jeter dans une jolie cellule dont il pourra bouffer les murs en hululant que les islamogauchistes lui grouillent sous la peau -, parfait produit de la pensée unique qui passe sont temps à verser toutes les larmes de son petit corps frêle sur l'immobilisme à la française et la nécessité de se serrer la ceinture avant d'aller déguster force canards aux pêches le petit doigt levé dans de dispendieux restaurant dont la carte coûte un SMIC, Christophe Barbier est journaliste et n'a t-on pas tout dit en le qualifiant ainsi ?

Élevé au lait tourné du néolibéralisme le plus frénétique, Christophe Barbier veut voir du privé partout. Bien, le privé. Mal, le public. Et comme tout de même le privé c'est un peu, un tout petit peu, plus cher que le public - vu que c'est, précisément, privé - il trépigne ici que tout doit être fait pour que l'éducation nationale - et ses profs gauchistes qui font chier à faire grève - disparaisse à tout jamais pour que les chères têtes blondes deviennent compétitives dans un privé qui ô joie continuera d'être joyeusement subventionné par les deniers publics...

Car le libéral n'en finit jamais de vomir à longs jets sur le public, mais n'oublie jamais après de lui réclamer des thunes, bien incapable qu'il est de se démerder tout seul avec la loi du Joli Marché Qui Rend Heureux Christophe Barbier. Le libéral a aussi une mémoire très sélective qui lui fait oublier que la situation de l'Éducation nationale - qu'il n'en finit jamais de déplorer - est due à trente années de réductions d'effectifs et de casse systématique du service public par les soins de ses écœurants semblables. Non, cela, le libéral n'en parlera jamais, pas plus qu'il ne mettra en exergue que l'une des raisons majeures de vendre le public au privé est une question idéologique : casser le bastion de la gauche pour fourrer de la merde dans les têtes des gamins qui ne sont pas encore assez détruits par la propagande des amis de Christophe barbier. Lesquels amis, à l'instar de, justement, Christophe Barbier, vont encore se répandre sur tous les plateaux-télé et tous les éditoriaux pour pleurer ouin ouin ouin leur terrible souffrance de vivre en Bolchévie totalitaire qui musèleflorentpagnesque liberté de penser (de noires conneries).

Si on était un peu méchant, on en rêverait presque de voir Christophe Barbier pendu par les pieds avec son écharpe pendant que des écoliers hilares lui jetteraient des cailloux pointus au visage sous l'oeil attendri de leur maîtresse. Mais heureusement, on est dans le camp du Bien, et c'est nous les plus Gentils. On se contentera donc de prendre Christophe Barbier pour ce qu'il est : un grand vide à l'intérieur qui produit du rien à l'extérieur. Même si ça, c'est déjà beaucoup, beaucoup trop.


jeudi 1 octobre 2009

Un journalisme de complaisance pour un 14 juillet de « concorde nationale »


La « fête nationale » a donné lieu cette année, peut-être plus encore que d’habitude, à une débauche d’émissions et de reportages en l’honneur du président de la république et des armées. 

Bien entendu, on comprend que la classe dirigeante préfère exhiber les engins de mort dont dispose l’armée plutôt que de s’interroger sur la responsabilité des marchands de canons français (groupes Dassault, Lagardère, etc.) dans les conflits militaires qui déchirent nombre de pays du Sud. On perçoit aussi, particulièrement en temps de crise, la nécessité de célébrer ceux qui nous gouvernent et l’armée au service des multinationales françaises, plutôt que la révolution française de 1789 et ce qu’elle représente : l’irruption des classes populaires sur la scène politique. L’imposture ira jusqu’à ces clips télévisés en l’honneur de l’armée, affirmant que « depuis toujours, la Défense est au service de la paix ». Les victimes de ces grandes boucheries qu’ont été les guerres mondiales et coloniales apprécieront. 

Plus profondément, qu’en est-il du rôle des grands médias – privés ou publics – dans cette campagne de désinformation ? En effet, ils n’ont pas simplement relayé sans broncher cette campagne ; ils lui ont donné un retentissement sans pareil. Cela débute sur le « service public » (en l’occurrence France 5), avec la diffusion lundi soir d’un documentaire effarant de complaisance sur le chef de l’Etat, « à visage découvert ». Outre des questions parfaitement inoffensives posées à Sarkozy lui-même, on verra notamment les auteurs du documentaire s’extasier devant la « dimension internationale » acquise par Sarkozy et solliciter des collaborateurs (Guaino, Guéant, Hortefeux, etc.) ou des politiciens amis (Blair, Merkel, El Assad, etc.) pour nous dire tout le bien qu’ils pensent du président français. 

Le 14 juillet, c’est TF1 qui obtient, comme il se doit, ses entrées à l’Elysée pour proposer aux téléspectateurs non seulement une séance de tourisme (dont le guide n’est autre que Claude Guéant, secrétaire de l’Elysée), mais surtout un entretien avec la femme du souverain : Carla Bruni. On apprendra ainsi que Sarkozy « est habité par une obsession, qui est de servir notre pays et d'aller au bout de ses promesses », et que « désormais l’armée nous protège de la guerre ». Il est vrai que le propriétaire de la chaîne, Martin Bouygues, n’est rien moins que le « meilleur ami » du président (d’après Sarkozy lui-même), son témoin de mariage et le parrain de son dernier enfant. 

Enfin, France 2 enfonce le clou pendant la soirée en proposant une émission consensuelle à l’extrême. Celle-ci vise essentiellement à embellir l’image de l’armée en invitant des stars du show-biz (Darmon, Dombasle, Lizarazu, etc.) à en faire la promotion. L’émission s’achève sur une interview présidentielle, servile jusqu’à la nausée, de Michel Drucker, durant laquelle le téléspectateur se voit informé de choses capitales : le président admire le cycliste Lance Armstrong et pratique lui-même le vélo à ses heures perdues. Concernant la crise, les emplois, les salaires, le logement, on repassera : le 14 juillet c’est l’heure de la « concorde nationale », et les grands médias sont là pour nous le rappeler. 

On ne peut que s’opposer à cette pratique d’un journalisme de cour, qui passe sous silence la crise et ses effets délétères pour la majorité de la population, réduit l’information au simple discours que les puissants portent sur eux-mêmes, et ramène la politique aux banalités qui émaillent le quotidien des politiciens professionnels (et de leurs compagnes…). Plus que jamais, le droit d’informer et de s’informer correctement – dont la condition tient dans un véritable pluralisme et une indépendance réelle de la presse (vis-à-vis du patronat et du gouvernement) – est une Bastille à prendre. 

25 juillet 2009.